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Méditation du 2ème dimanche de l'Avent B - Marc 1, 1-8



Comme Elisabeth l’a exprimé dimanche passé, prendre la parole ce dimanche, c’est aussi une occasion pour moi de méditer, de travailler cette Parole de Dieu proposée dans les textes d’aujourd’hui.

C’est une belle occasion, car quand on a l’âge que j’ai, on finit par croire qu’on les connaît par cœur, ces textes.

Ah oui, ce dimanche, c’est JB ! le désert, les poils de chameau, les sauterelles, conversion, baptême et pardon des péchés !

Et pourtant, parce que je m’obstine, au détour des lectures et relectures, une phrase surgit, comme annonçant une piste nouvelle.

« ils étaient baptisés en reconnaissant publiquement leurs péchés ».

Je répète, pour ceux qui ne mesureraient pas l’énormité de ce qui est écrit : ils reconnaissaient PUBLIQUEMENT leurs péchés.

Rassurez-moi, je ne suis pas la seule que ça horrifie ! Vous iriez, vous, avec tous les habitants de Luxembourg, vous faire baptiser dans la Pétrusse par un gars vegan, vêtu d’une tunique de lin sauvage, en reconnaissant PUBLIQUEMENT vos péchés ? Pas moi !

Mais je me connais ! là où germe ma perplexité se trouve souvent une belle piste à explorer, un lieu d’approfondissement de ma foi.


Quelle est mon expérience de « reconnaître publiquement mon péché ? ».

C’est présenter mes excuses parce que mes paroles ont dépassé ma pensée, et qu’elles étaient chargées de trop de violence pour être audibles ;

C’est reconnaître que, depuis des jours, je n’arrête plus de courir, et qu’à la maison, je ne fais plus attention à personne.

C’est avouer que je repousse cette tâche ingrate depuis des semaines, et que les conséquences s’en font ressentir.


Je ne sais pas si cela tient à mon tempérament ou si cette expérience vous parlera, mais il me semble qu’au moment où ces « péchés » - appelons-les comme cela, sont avoués, il y a comme un nœud qui se dénoue, comme un poids qui s’envole, une charge que l’on dépose. On s’enferrait dans une situation sans issue, entre culpabilité et colère, lassitude ou même dégoût de soi-même ou des autres.

Reconnaître sa part de responsabilité, sa fragilité, ouvre de nouvelles portes.

Oui, il s’agit bien de reconnaître sa fragilité. Sa part d’ombre, ses blessures intérieures, ses limites.

Car le « péché » est, me semble-t-il, rarement commis « pour le faire exprès », comme disent les enfants.


Alors, ne soyons pas non plus trop naïfs ! les nouvelles portes qui s’ouvrent, c’est une bien belle figure littéraire, mais parfois, elles s’entrebâillent plus qu’elles ne s’ouvrent. Et parfois même, le chemin semble inondé de larmes – je suis nulle, mauvaise mère, mauvaise épouse, … et j’en passe !

Je suis tentée de faire le parallèle, un peu osé, je l’avoue, entre l’eau du baptême que Jean propose et ces larmes. Oui, se convertir, c’est pleurer de n’être pas complètement unifié, pleurer de n’être pas parfaitement en paix avec soi-même et les autres. Mais c’est aussi la brèche nécessaire pour que quelque chose d’autre puisse advenir.


Mais cette brèche ouverte peut être source d’inquiétude.

Et maintenant que je suis dévoilé, si on profitait de ma faiblesse ? Si on me chargeait plus lourdement encore que du poids que je m’impose à moi-même ?

Revenons à l’évangile. Je crois que ce n’est pas pour rien que Jean-Baptiste est au désert. Pourquoi ne baptise-t-il pas dans une fontaine de la place publique de Jérusalem ?

Parce que tous ceux qui sont là ont dû se déplacer. Ils ont accepté, ils ont choisi de changer de perspective. Ils sont des fragilisés qui se rencontrent et s’accueillent mutuellement.


Et la boucle est bouclée : si je me reconnais pêcheur, j’ose accueillir les failles de l’autre, sans l’enfermer dans sa faute. J’ose confronter le réel de la vie aux principes rigides d’unemorale qui paralyse. Je rejoins la cohorte des hommes de bonne volonté. Humblement.


Jusque là, c’est une affaire bien humaine. Pas de Dieu.


C’est encore Jean-Baptiste qui nous emmène plus loin :

Quelqu’un d’autre viendra. Celui qui baptisera dans l’Esprit Saint.

Ah, le vent de l’Esprit ! C’est plus réjouissant que l’eau des larmes non ?

On sent que cela pousse au-delà de nous-même. On sent que, malgré tout, nous sommes rendus capables d’aimer, de nous aimer ! Que boiteux, aveugles ou paralytiques, nous pourrons malgré tout participer à l’œuvre créatrice de Dieu.


Mais pour que nous osions ainsi nous laisser pousser au-delà de nous-même, que notre fragilité de soit pas bousculée, il fallait que Dieu trouve le moyen de nous dire : je te comprends.

Il fallait un Dieu qui accepte de se rendre fragile.

Un Dieu, infini, tout puissant, créateur de l’univers qui, pour que l’homme ose venir à sa rencontre, se rend vulnérable. Un Dieu qui se fait homme.

Homme, il pleurera la mort de Lazare, homme, il parlera à la Samaritaine, il mangera avec Zachée… Nous sentons, en le contemplant dans les écritures, qu’il n’a pas fait « comme s’il était homme » ; s’il avait été Dieu déguisé en homme, tous ces cassés de la vie l’auraient rapidement démasqué : trop haut, trop lointain, trop inaccessible.

Mais Jésus, est « vrai Dieu né du vrai Dieu », disons-nous. Dans cette vulnérabilité d’homme, où se cache la vraie puissance de Dieu ?

Lui seul peut aimer par-dessus tout.

« Et quand les hommes n’arrivent plus à aimer ou à s’aimer, Dieu, lui, continue d’aimer. »

En Dieu, tout peut être réparé, assumé, dépassé… même la mort. »



Oups, mais voici déjà à Pâques !

N’allons peut-être pas si vite : Pour nous préparer à Noël, puissions-nous avoir au cœur cet émerveillement : Dieu s’est fait homme pour que nous puissions aimer en plénitude, pour que nous osions rêver à meilleur que nous même pour nous même.

Ciel nouveau et terre nouvelle, dit Saint Paul. Oui, quand l’homme sera enfin parfaitement réconcilié avec lui-même, les autres et son Dieu. Belle route en perspective !

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