Homélie du 32ème dimanche ordinaire C - Luc 20, 27.34-38

Les morts peuvent-ils ressusciter ? N’est-ce pas contraire à notre expérience humaine ? N’est-ce pas même impensable ? Beaucoup en ont la conviction : même des personnes qui croient en Dieu, l’évangile d’aujourd’hui en témoigne! Alors, que voulons-nous dire quand nous parlons de la résurrection des morts, quand nous espérons nous-mêmes être un jour définitivement auprès de Dieu ?
Dans l’évangile d’aujourd’hui, il est clairement question d’un débat contradictoire entre le puissant groupe des Sadducéens et Jésus. Ceux-ci ne croyaient qu’en ce qui était écrit dans les cinq livres de Moïse. Le reste était refusé ; ainsi, la doctrine de la résurrection des morts, dont il est question dans les textes plus tardifs de l’Ancien Testament. Les sadducéens s’appuyaient sur la prescription du lévirat concernant les mariages, il fallait épouser la veuve de son frère pour lui donner une descendance (en Deutéronome 25). Cette prescription de Moïse n’était donc pas compatible avec une résurrection des morts. Le positionnement des Sadducéens relève d’une fausse conception de la résurrection. Ils ne pouvaient comprendre la résurrection autrement que sous la forme d’une réanimation du corps et d’une continuation de la vie terrestre.
Jésus leur réplique donc : « Vous êtes dans l’erreur, vous méconnaissez l’Écriture et la puissance de Dieu. » (Mc 12,24).
Le mariage ne vaut que pour ce monde-ci. Ceux qui participent à l’autre monde ne peuvent plus mourir, et ils ne se marient pas, parce qu’ils sont devenus semblables aux anges (cf Lc 20,34-36).
La vie des ressuscités sera donc bien différente des représentations qu’en avaient les sadducéens.
Les ressuscités reçoivent une forme d’existence radicalement nouvelle ; une existence en quelque sorte ‘transcendée’. Paul l’évoque en 1 Cor 15, 42-44 :
« Ainsi en est-il de la résurrection des morts. Ce qui est semé périssable ressuscite impérissable ; ce qui est semé sans honneur ressuscite dans la gloire ; ce qui est semé faible ressuscite dans la puissance ; ce qui est semé corps physique ressuscite corps spirituel ; car s’il existe un corps physique, il existe aussi un corps spirituel. »
La vie de ce monde est une chose (« les enfants de ce monde se marient ») et que la vie dans l’autre monde est tout autre chose.
Là nous serons semblables aux anges c’est-à-dire que nous n’aurons plus d’autre préoccupation que de nous réjouir d’être en présence de Dieu et nous ne pourrons plus mourir.
Dieu nous laisse donc espérer que la vie dépasse la mort.
Dieu peut redonner vie aux morts de manière inimaginable.
Et parce que nous ne pouvons l’imaginer, ce message de la résurrection est devenu si étrange et incompréhensible.
De plus, cela l’est aussi à cause de notre façon étriquée de nous représenter qui est Dieu et quelle est son action créatrice.
Ce rejet de la résurrection témoigne aussi d’une méconnaissance des Ecritures. Jésus cite le deuxième livre de Moïse, le livre de l’Exode (3,6), où Dieu se révèle à Moïse sous son nom : « Je suis le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob ». Dieu s’est manifesté à eux, les Patriarches, eux qui ont fait l’expérience de son soutien. D’où la conclusion : Dieu n’est pas un Dieu des morts, mais le Dieu des vivants. Dieu s’est manifesté à eux au-delà de la mort ; les patriarches ne sont pas simplement des morts, ils font partie des vivants par la puissance créatrice de Dieu.
A quoi servirait l’aide divine, si la fin de l’homme est sa mort définitive ?
Et c’est précisément sur ce point que le message de l’évangile d’aujourd’hui révèle son actualité. Aucun être humain, ne peut plus disparaître ni être perdu définitivement, parce que l’amour et le souci de Dieu pour chacun ne cesse jamais ; parce que nous sommes connus et aimés de lui. C’est là le point central de l’évangile : nous continuerons de vivre ; non pas par nos propres forces, mais parce que nous sommes connus et aimés de Dieu d’une manière qui fait que nous ne pouvons pas périr ni disparaître. Nous ne pouvons nous le représenter. Mais une chose est certaine : l’essentiel de la personne humaine demeure ; ce qui a mûri durant la vie terrestre continue d’exister autrement. Cela continue, car c’est sublimé dans l’amour de Dieu : ce n’est pas détruit mais c’est transformé et conservé. C’est la source d’une joie profonde. Remercions le Seigneur pour ce don de la foi.