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Homélie du 14ème dimanche ordinaire C - Luc 10, 1-9


Frères et sœurs,

À chaque fois que nous écoutons ce passage d'évangile, la tentation est forte de n'entendre que l'invitation à prier le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers (Luc 10,2). Nous pensons alors un peu trop rapidement que ce texte s'adresse principalementà d'autresqu'à nous.

Dans l'évangile de Luc Jésus a d'abord envoyé les Douze en mission. Puis à nouveau il appelle et il envoie non plus douze mais soixante-douze. Un chiffre sans doute symbolique qui désigne les peuples du monde entier, les soixante-douze peuples de la terre dont parle le livre de la Genèse (Genèse 10, 2-31). La mission n'est plus confiée à quelques-uns, mais à tous. L'évangéliste n'a de cesse de rappeler que la Bonne Nouvelle n'est pas à destination seulement du peuple élu. Elle doit « résonner jusqu'aux extrémités de la terre ».


Les soixante-douze sont envoyés deux par deux. Ce ne sont pas des individus isolés qui sont appelés. Ils sont désignés et envoyés deux par deux pour être des témoins. Être envoyé deux par deux, c'est découvrir et prendre en compte l'autre différent de soi. C'est faire ses premières armes avec les rudiments de la vie communautaire. C'est faire une expérience d'Eglise. Ne serait-ce pas déjà participer à la marche des compagnons d'Emmaüs au soir de Pâques ?

Pouvoir avec un frère parler et reparler du chemin parcouru, des personnes rencontrées, des événements vécus au point de reconnaître dans la force du partage et la grâce du dialogue le visage de celui qui rejoint sur la route ceux-là à qui il donne mission d'aller « dans toutes les villes et les localités où lui-même devait aller » (Luc 10,1).


Villes et localités qui nous attendent ou ne nous attendent pas mais c'est là que nous sommes invités à porter l'espérance, sans argent et sans bagage, en offrant surtout le shalom, la paix. Porter l'espérance, oui !

« Le règne de Dieu est tout proche de vous » voilà l'unique message confié au soixante-douze disciples. Ce règne porte un nom : Jésus, le Christ. Ainsi les disciples partent-ils en avant pour annoncer sa venue. Ils vont trouver les gens pour leur dire qu'il leur arrive quelqu'un, un don, une joie. Reprenons un instant Isaïe 66, l'ensemble de la première lecture de ce jour. « Réjouissez-vous avec Jérusalem ...avec elle soyez pleins d'allégresse ». Le Règne de Dieu est paix et joie dans l'Esprit. « Vous serez nourris et rassasiés » (Isaïe 66, 10). Le message évangélique nous rappelle l'issue heureuse de toute notre histoire humaine. « Le Règne de Dieu est tout proche de vous », le Christ ne vient pas lier des fardeaux sur vos épaules, il vient vous en libérer. Le Christ - le Royaume est là, à vos portes, dans vos vies.


« N'emportez ni argent, ni sac, ni sandales ». N'emportez rien, c'est-à-dire rien d'autre que ce message de la « bonne nouvelle » que vous avez découvert et dont je vous ai parlé, dit Jésus, comme d'un trésor caché dans un champ, ou comme d'une perle de grand prix. Ne rien emporter car il ne s'agit pas d'éblouir les destinataires du message par la richesse, le prestige, pas même le prestige de la parole.


Aussi, la seconde lecture de ce dimanche invite les disciples à se présenter dans la pauvreté et la vulnérabilité. « Que la croix de Notre Seigneur Jésus-Christ reste mon seul orgueil » écrit Paul aux Galates. Le messager annonce le Christ qui nous montre qui est Dieu.

Interrogeons-nous alors sur la manière dont nous essayons d’incarner ce qui est proposé par Jésus : ne pas conditionner les destinataires de l'Evangile par le poids des « richesses » de tous ordres qui sont «étrangères » à cet Evangile.

Porter l'espérance, ne rien emporter, et puis offrir la paix à la manière des agneaux.

En consentant à la vulnérabilité, à la fragilité de qui sait tenir debout grâce à d'autres et pour les autres aussi. Se laisser toucher par celles et ceux avec lesquels nous allons partager une parole, un moment, un repas. Risquer un pas vers ce qui est inconnu, oser une rencontre, être chacun à notre façon témoin de la parole reçue pour faire advenir le Règne de Dieu - voilà à quoi nous sommes appelés - avec les Douze, avec les soixante-douze – à essayer de dire Dieu aux hommes et aux femmes de notre temps.

L'évangile, revenons-y, insiste beaucoup sur la liberté - celles des messagers comme celle des destinataires de la « bonne nouvelle ». S'ils ne sont pas reçus, les disciples ne se laisseront dominer ni par la déception, ni par l'angoisse... mais ils partiront ailleurs, vers d'autres cités - et ils partiront dans la paix. Car une seule chose est nécessaire : désirer offrir l'amitié de Dieu, partager la joie de l’Evangile !

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