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Homélie du 4ème dimanche de Carême - Jean 9, 1-41


Deuxième scrutin des catéchumènes : Pour que les baptisés puissent vivre la dimension de conversion avec les catéchumènes, « ... On a rétabli pour l’année A, les Évangiles traditionnels de l’initiation chrétienne : Samaritaine, Aveugle né, Lazare ressuscité ; en raison de leur importance, on peut les utiliser aussi pour les années B et C, en particulier là où il y a des catéchumènes. » (Présentation générale du Lectionnaire romain n°21)

Dieu vivant, recevant de toi intelligence et énergie, nous comprenons plus profondément la Bonne Nouvelle et nous nous engageons de grand coeur dans les luttes de la vie chrétienne ; rendus capables de devenir tes enfants, nous sommes heureux de naître à nouveau et de vivre dans ton Eglise.


Frères et sœurs,

Dimanche dernier, avec l’évangile de la Samaritaine, nous avons entendu comment Jésus a étanché la soif de cette femme en lui proposant l’eau vive.

Ainsi, elle est introduite en croissance spirituelle : le désir d’unifier sa vie et d’adorer désormais en esprit et en vérité.

Aujourd’hui nous sommes témoins de la rencontre de Jésus, accompagné de ses disciples, avec un aveugle-né. Cette rencontre a lieu près de la piscine de Siloé, et ce nom signifie ‘envoyé’. Ainsi, l’évangile johannique insiste à nouveau sur l’envoyé de Dieu, sur Jésus et sur sa mission. Beaucoup de contemporains de Jésus s’interrogeaient sur son identité. Est-il vraiment l’envoyé de Dieu ou est-ce un imposteur ? Et nous ? Ne sommes-nous pas souvent aveuglés par nos certitudes ? Savons-nous nous laisser surprendre ?

Or Jésus essaye de nous faire comprendre pourquoi il est là et pour qui. Son message est lumineux : prophétiquement, il vient guérir un infirme le jour du sabbat. Or, la certitude des Juifs, c’est bien que la Loi demande d’observer, le jour du sabbat, le repos le plus absolu, de prier et de se familiariser avec la Parole de Dieu. Jésus, lui, veut précisément les aider progressivement à sortir de leurs évidences et à voir de plus en plus les choses en esprit et en vérité.

Il rencontre l’aveugle en sortant du temple. Cette rencontre se passe en trois étapes adoptant le point de vue de l’aveugle, des disciples, des Juifs et de Jésus. Jésus commence par faire de la boue qu’il applique sur les yeux de l’aveugle. Ce geste rappelle le récit de la Création : Dieu a modelé l’homme avec la poussière du sol. L’acte créateur de Dieu continue en Jésus. La boue, quant à elle, pourrait symboliser l’égocentrisme et le péché : tout ce qui dérègle notre regard et nous empêche de reconnaître Dieu comme notre Père et de voir dans les autres nos frères et sœurs, bien aimés de Dieu.

Ensuite, en effet, sur l’ordre de Jésus, l’aveugle va se laverà la piscine de Siloé et il recouvre la vue. En lui, s’est donc manifesté l’action de Dieu. Comme l’avait d’emblée dit Jésus : « Ni lui, ni ses parents n’ont péché. Mais l’action de Dieu devait se manifester en lui. » C’est une épiphanie ! C’est aussi la démarche chrétienne du chemin de conversion vers le baptême, comme les catéchumènes en chemin vers Pâques ou comme les parents faisant la démarche de présenter leurs enfants au baptême.

Enfin, dans une troisième étape, l’aveugle guéri découvre une autre lumière, quand Jésus répond à sa question, devenue la nôtre ce dimanche, « Qui est-il pour que je croie en Lui ? » : « Tu vois le Fils de l’homme, et c’est lui qui te parle. » L’aveugle guéri peut alors exprimer le fond de son désir et se découvrir croyant : « Je crois, Seigneur », et il se prosterne devant Jésus. Ce cheminement du désert obscur au désir lumineux s’est fait progressivement. Après avoir été guéri, il parle d'abord de "cet hommequ'on appelle Jésus" ; puis il dit que c'est un prophète, puis un homme de Dieu. Et enfin, il reconnaît en lui le Seigneuret il se prosterne devant lui.

La foi des disciples est également ajustée. Au début, ils avaient une conception étriquée de Dieu. C’est bien eux, en effet, qui avaient posé spontanément cette question à propos de l’aveugle de naissance : ‘Est-ce lui qui a péché ou bien ses parents ?’ Ne cessons-nous pas, nous non plus, à chercher sans cesse des coupables ? Ils imaginaient un Dieu qui ne ferait que punir les méchants et récompenser les bons. Jésus coupe court à ce type de questionnement : ni lui, ni ses parents… Il leur révèle, et nous révèle, que Dieu est tout amour et veut sauver tous les hommes, les publicains, les pécheurs, les Samaritains… Et c'est lui, Jésus, qui réalise ce projet de Dieu. Tout l'évangile nous dit qu'il est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus.

Frères et sœurs, oui, reconnaissons-nous nous-mêmes dans cet aveugle sur le chemin de Jésus. C’est Jésus qui nous voit, dans notre malheur, et qui s’approche de nous. Ne pouvons-nous pas le laisser nous mettre de la boue sur les yeux ? Nous pourrons ensuite aller nous laver à la fontaine de Siloé, puis revenir près de lui et à notre tour, du fond du cœur lui crier : je crois ! Vivre désormais de cette certitude confiante : Lui est toujours là, à chaque étape de ma route, par sa Parole et par son pain, pour me guérir, me relever et me redonner force et courage, et ainsi, sans craindre la confrontation prévisible de Jérusalem, aller jusqu’au bout de l’amour. Il est la lumière du monde, il veut éclairer les yeux de mon coeur et lui rendre la vue, apercevoir enfin les merveilles de Dieu, baliser mon itinéraire spirituel avec ses désolations et consolations…

Mais ce cheminement n’est plus pour moi tout seul, car la Lumière reçue rayonne divinement d’elle-même, comme la lampe placée sur le lampadaire dans la nuit obscure !

Ainsi, l’aveugle guéri par Jésus est devenu son témoin. Le Seigneur, comme à la transfiguration, offre désormais sa lumière à tous ceux qui lui font confiance ; aveugles guéris, nous pouvons, à notre tour, inviter les hommes de bonne volonté laisser leur désir de vie en plénitude rejoindre sa source : « Celui-ci est mon Fils bien aimé, en qui j’ai mis tout mon amour, écoutez-le ! »

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